Loi pour une République Numérique

Fiches pratiques, L'actu du CHRD — 8 octobre 2016

RepubliqueNumeriqueLa loi République Numérique (à découvrir en cliquant ici) a été adoptée le 7 octobre 2016 et publiée au Journal Officiel le 8 octobre suivant. Si des décrets sont encore nécessaires pour permettre l’application de toutes les mesures (la totalité des textes devant être publiés dans les six mois suivant la promulgation de la loi, soit avant le 8 avril 2017), nous souhaitions déjà vous faire part des avancées obtenues.

       I.            Obligation de transparence et de loyauté des plateformes en lignes (articles 49 et 50)

Jusqu’alors, la notion de plateformes en ligne n’avait pas été définie par la loi, et ce malgré leur importance grandissante dans les modes de consommation.

L’article 49 de la loi vient modifier l’article L.111-7 du code de la consommation.

Dans une première partie, cet article définit les plateformes en ligne concernées par le texte, à savoir :

  • Les plateformes de classement ou référencement, au moyen d’algorithmes informatiques, de contenus, de biens ou de services proposés ou mis en ligne par des tiers. Cela vise les plateformes comme Trivago, Kayak, mais aussi TripAdvisor, etc.
  • Les plateformes de mise en relation de plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un contenu, d’un bien ou d’un service.

Cela vise donc à la fois la mise en relation de consommateurs :

    • avec des professionnels : La Fourchette, Booking, Expedia, etc.,
    • mais aussi avec des non-professionnels : Vizeat, AirBnB, Abritel, LeBonCoin, Blablacar, etc.

Dans une deuxième partie, sont fixées les obligations que doivent désormais respecter ces plateformes en ligne.

Dorénavant, elles auront l’obligation de fournir une information loyale, claire et transparente aux consommateurs sur :

  • leurs conditions générales d’utilisation du service d’intermédiation proposé,
  • leurs modalités de référencement, de classement et de déréférencement des contenus, des biens ou des services auxquels ce service permet d’accéder,
  • l’existence d’une relation contractuelle, d’un lien capitalistique ou d’une rémunération à son profit, dès lors qu’ils influencent le classement ou le référencement des contenus, des biens ou des services proposés ou mis en ligne (ex. les contrats preferred de Booking.com),
  • la qualité de l’annonceur (ex. professionnel ou particulier) et les droits et obligations des parties en matière civile et fiscale, lorsque des consommateurs sont mis en relation avec des professionnels ou des non-professionnels.

Un décret viendra préciser les conditions d’application de cet article.

Cet article de la loi reprend un certain nombre de préconisations édictées par le Conseil National de la Consommation (CNC) dans ses travaux relatifs aux plateformes en ligne, travaux auxquels l’UMIH a participé activement. Il est fort probable que les rédacteurs du décret s’inspireront également de cet avis consultatif.

L’article 50 de la loi (L.111-7-1 du code de la consommation) prévoit que les opérateurs de plateformes en ligne dont l’activité dépasse un certain nombre de connexions (à déterminer par décret) doivent publier des « bonnes pratiques visant à renforcer les obligations de clarté, de transparence et de loyauté » vis-à-vis du consommateur.

Les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) seront en charge de s’assurer du respect des obligations de loyauté et de transparence des plateformes vis-à-vis des consommateurs. Pour cela, ils seront dotés de nouveaux pouvoirs et pourront notamment :

–          procéder à des enquêtes administratives auprès des plateformes,

–          rendre publique la liste des plateformes ne respectant pas leurs obligations.

 

     II.            Régulation des plateformes de l’économie collaborative (article 51)

L’UMIH a constaté une explosion de la concurrence déloyale liée à la multiplication de toutes les formes de commerces illégaux, notamment la location meublée touristique via des plateformes étrangères. Cette activité s’est développée de manière exponentielle, sans aucun contrôle, et en abusant parfois du flou juridique existant pour devenir de vrais activités hôtelières déguisées. L’UMIH a monté plusieurs opérations de communication pour mettre en lumière l’industrialisation de l’économie dite collaborative et a proposé une série de mesures pour encadrer cette activité.

Toutes ces actions ont permis de premières avancées vers la transparence et les contrôles avec l’adoption des mesures d’encadrement suivantes :

  • La possibilité d’enregistrer les locations de meublés en mairie

Dans toutes les communes où le changement d’usage des locaux destinés à l’habitation est soumis à autorisation préalable, le conseil municipal peut décider de mettre en place une déclaration préalable soumise à enregistrement pour toute location de courte durée d’un local meublé. Ces communes sont celles visées aux articles L.631-7 et L.631-9 du code de la construction et de l’habitat, c’est-à-dire les communes de plus de 200 000 habitants et la petite couronne parisienne, et les zones d’urbanisation continue de plus de 50.000 habitants définies comme zones tendues. Les autres communes, pour procéder de même, doivent obtenir une décision de l’autorité administrative sur proposition du maire.

Lorsqu’elle est mise en œuvre, cette déclaration soumise à enregistrement se substitue à la déclaration en mairie de l’article L. 324-1-1 du code du tourisme.

Concernant la procédure, cette déclaration peut notamment être effectuée par téléservice.

Dès réception de la déclaration, la commune délivre sans délai un accusé-réception comprenant un numéro de déclaration. Toute offre de location de courte durée d’un meublé touristique soumis à déclaration préalable devra contenir ce numéro de déclaration (art. L324-2 du code du tourisme).

Les modalités plus précises de la procédure de déclaration seront explicitées dans un décret.

  • Les nouvelles obligations des plateformes

La loi République Numérique a modifié l’article L.324-2-1 du code du tourisme en insérant de nouvelles obligations pour « toute personne qui se livre ou prête son concours contre rémunération, par une activité d’entremise ou de négociation ou par la mise à disposition d’une plateforme numérique, à la mise en location d’un local meublé » qui devront désormais :

  • Obtenir de chaque loueur le statut de la résidence (principale ou autre) et le numéro d’enregistrement du logement pour les communes où il existe ;
  • Publier le numéro d’enregistrement dans l’annonce relative au local ;
  • Veiller à ce qu’une résidence principale ne soit pas louée plus de 120 jours par an et en informer la commune le cas échéant.

Le délai de 120 jours, soit quatre mois, correspond à la notion de la résidence principale qui est définie par la loi comme le logement occupé au moins huit mois par an. Il est à noter qu’au-delà de 120 jours de location, le logement constituant la résidence principale du loueur ne pourra plus faire l’objet d’une offre de location par cet intermédiaire jusqu’à la fin de l’année en cours.

Les modalités de contrôle et les sanctions encourues notamment par les plateformes en ligne en cas de non-respect de ces obligations seront définies par décret.

Cet article est une réelle avancée vers une concurrence plus loyale entre les différents types d’hébergement, et l’UMIH souhaite que cela permette de limiter certaines dérives de professionnalisation de la location de meublés de tourisme.

 

  III.            Réglementation des avis en ligne (article 52)

Dans son article 52, la loi pour une République Numérique traite enfin des avis en ligne en insérant un article L.111-7-2 au code de la consommation.

Les plateformes d’avis en ligne (comme TripAdvisor, mais également toute plateforme offrant ce service) comme tout acteur collectant, modérant ou diffusant des avis en ligne, ont désormais l’obligation de délivrer aux utilisateurs une information loyale, claire et transparente sur les modalités de publication et traitement des avis mis en ligne à savoir :

  • Préciser si ces avis font l’objet d’un contrôle et, le cas échéant, en indiquer les caractéristiques principales,
  • Afficher la date de l’avis et de ses éventuelles mises à jour,
  • Indiquer aux consommateurs dont l’avis n’a pas été publié les raisons justifiant son rejet,
  • Mettre en place une fonctionnalité gratuite permettant de signaler un doute sur l’authenticité d’un avis.

Les modalités et le contenu de ces informations doivent être déterminés par décret.

L’UMIH participe actuellement, en tant que co-rapporteur, au groupe de travail du Conseil National de la Consommation qui a été saisi du mandat visant à déterminer les informations essentielles et adaptées que devront fournir les sites internet. Cet avis devrait très largement inspirer la rédaction du décret d’application de ce nouvel article L.111-7-2 du code de la consommation.

  • L’UMIH se félicite qu’un grand nombre de ses recommandations aient été suivies dans cette loi. Toutefois, il reste à s’assurer de leur application pour davantage de transparence et de contrôles, notamment par des décrets pertinents et par la mise en place  effectives de ces mesures par les communes.

Source : circulaire juridique UMIH 42-16.