Coronavirus : paiement des loyers et charges des locaux
Fiches pratiques, L'actu du CHRD — 4 janvier 2021La loi n° 2020-1379 du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l’état d’urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire a été publiée au Journal Officiel le 15 novembre 2020. Elle prévoyait en son article 14 un mécanisme de protection du locataire contre les sanctions et pénalités en cas de non-paiement du loyer et/ou des factures d’eau, de gaz et d’électricité (voir notre précédent article).
Il était indiqué dans cette circulaire que les critères d’éligibilité seraient précisés par décret, lequel déterminerait « les seuils d’effectifs et de chiffre d’affaires des personnes concernées ainsi que le seuil de perte de chiffre d’affaires constatée du fait de la mesure de police administrative ».
Le décret attendu, n° 2020-1766 du 30 décembre 2020, a été publié au Journal Officiel le 31 décembre 2020. Il fixe les conditions d’éligibilité au mécanisme de protection prévu par l’article 14 de la loi du 14 novembre 2020 et s’applique de manière rétroactive à compter du 17 octobre 2020.
PERIMETRE DES ENTREPRISES ELIGIBLES
Les entreprises, exerçant une activité économique affectées par une mesure de police administrative prise en application de la loi du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l’état d’urgence sanitaire ou de l’article L3131-15 du Code de la Santé Publique, qui pourront bénéficier des mesures de l’article 14 de la loi du 14 novembre 2020 sont les personnes physiques et morales de droit privé remplissant les critères d’éligibilité suivants :
1°) Leur effectif salarié est inférieur à 250 salariés. Le seuil d’effectif est calculé selon les modalités prévues par le I de l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale.
Les associations doivent compter au moins un salarié.
Concernant le seuil d’effectif salarié, il est tenu compte de l’ensemble des salariés des entités liées lorsque l’entreprise locataire contrôle ou est contrôlée par une autre personne morale au sens de l’article L. 233-3 du code de commerce.
2°) Le montant de leur chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos est inférieur à 50 millions d’euros. Pour les activités n’ayant pas d’exercice clos, le montant de leur chiffre d’affaires mensuel moyen est inférieur à 4,17 millions d’euros.
3°) Leur perte de chiffre d’affaires est d’au moins 50 %, appréciée selon les modalités suivantes :
– la perte de chiffre d’affaires est constatée durant la période comprise entre le 1er novembre 2020 et le 30 novembre 2020,
– la perte de chiffre d’affaires est le résultat de la différence entre, d’une part, le chiffre d’affaires réalisé au cours du mois de novembre 2020 et, d’autre part :
o le chiffre d’affaires durant la même période de l’année précédente,
o ou, si l’entreprise le souhaite, le chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019,
o ou, pour les entreprises créées entre le 1er juin 2019 et le 31 janvier 2020, le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020,
o ou, pour les entreprises créées entre le 1er février 2020 et le 29 février 2020, le chiffre d’affaires réalisé en février 2020 et ramené sur un mois,
o ou, pour les entreprises créées après le 1er mars 2020, le chiffre d’affaires mensuel moyen réalisé entre le 1er juillet 2020, ou à défaut la date de création de l’entreprise, et le 30 septembre 2020.
Important : pour les établissements ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public, le chiffre d’affaires du mois de novembre 2020 n’intègre pas le chiffre d’affaires réalisé sur les activités de vente à distance avec retrait en magasin ou livraison.
NB : les conditions relatives à l’effectif salarié et au chiffre d’affaires sont considérées au premier jour où la mesure de fermeture administrative s’applique.
MODALITES ET PREUVES DE L’EGIBILITE
Les personnes physiques et morales de droit attestent réunir les conditions d’éligibilité en produisant une déclaration sur l’honneur. Cette déclaration est accompagnée de tout document comptable, fiscal ou social permettant de justifier les conditions relatives au seuil d’effectif salarié et au chiffre d’affaires. La perte de chiffre d’affaires est établie sur la base d’une estimation.
Les entreprises de moins de 50 salariés bénéficiaires du fonds de solidarité peuvent justifier de leur situation en présentant l’accusé-réception du dépôt de leur demande d’éligibilité au titre du mois de novembre 2020, accompagné de tout document comptable ou fiscal permettant de justifier qu’elles ne dépassent pas le niveau de chiffre d’affaires mentionné précédemment.
RAPPEL DES MESURES PREVUES PAR L’ARTICLE 14 DE LA LOI DU 14 NOVEMBRE 2020
1 ) Interdiction d’infliger des pénalités en cas de défaut de paiement de loyer ou de charges locatives pour les locaux professionnels des entreprises concernées
Les entreprises éligibles ne peuvent encourir d’intérêts, de pénalités ou toute mesure financière ou encourir toute action, sanction ou voie d’exécution forcée à leur encontre pour retard ou non-paiement des loyers ou charges locatives afférents aux locaux professionnels ou commerciaux où leur activité est ou était ainsi affectée.
Cela s’applique aux loyers et charges locatives dus pour la période au cours de laquelle l’activité de l’entreprise est affectée par une mesure de police jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois à compter de la date à laquelle leur activité cesse d’être affectée par une mesure de police.
Les intérêts ou pénalités financières ne peuvent être dus et calculés qu’à compter de l’expiration de ce délai.
Pendant cette même période, les sûretés réelles et personnelles garantissant le paiement des loyers et charges locatives concernés ne peuvent être mises en oeuvre et le bailleur ne peut pas pratiquer de mesures conservatoires.
Toute stipulation contraire, notamment toute clause résolutoire ou prévoyant une déchéance en raison du non-paiement ou retard de paiement de loyers ou charges, est réputée non écrite.
En outre, les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le bailleur à l’encontre du locataire pour non-paiement de loyers ou de charges locatives exigibles sont suspendues jusqu’à l’expiration du délai de deux mois à compter de la date à laquelle l’activité cesse d’être affectée par une mesure de police.
2°) Interdiction de cesser la fourniture d’électricité, de gaz et d’eau pour les entreprises concernées en cas de non-paiement des factures
Jusqu’à l’expiration du délai de deux mois à compter de la date à laquelle l’activité cesse d’être affectée par une mesure de police, ne peuvent procéder à la suspension, à l’interruption ou à la réduction, y compris par résiliation de contrat, de la fourniture d’électricité, de gaz ou d’eau aux personnes éligibles pour non-paiement par ces dernières de leurs factures :
1. Les fournisseurs d’électricité titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 333-1 du code de l’énergie ;
2. Les fournisseurs de gaz titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 443-1 du même code ;
3. Les fournisseurs et services distribuant l’eau potable pour le compte des communes compétentes au titre de l’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales.
Les fournisseurs d’électricité ne peuvent procéder au cours de la même période à une réduction de la puissance distribuée aux personnes éligibles.
3°) Possibilité de reporter et d’échelonner le paiement des factures d’électricité, de gaz et d’eau pour les entreprises concernées, sans pénalité
Les entreprises éligibles pourront demander, sans qu’il ne leur soit infligé aucune pénalité financière, frais ou indemnité, le report des échéances de paiement des factures exigibles et non acquittées entre le 17 octobre 2020 et un délai de deux mois à compter de la date à laquelle l’activité cesse d’être affectée, auprès :
– Des fournisseurs d’électricité titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 333-1 du code de l’énergie, alimentant plus de 100 000 clients,
– Des fournisseurs de gaz titulaires de l’autorisation mentionnée à l’article L. 443-1 du code de l’énergie, alimentant plus de 100 000 clients,
– Des fournisseurs d’électricité qui interviennent dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental,
– Des entreprises locales de distribution définies à l’article L. 111-54 du code de l’énergie,
– Des fournisseurs et services distribuant l’eau potable pour le compte des communes compétentes au titre de l’article L. 2224-7-1 du code général des collectivités territoriales.
Le paiement des échéances ainsi reportées est réparti de manière égale sur les échéances de paiement des factures postérieures, sur une durée qui ne peut pas être inférieure à six mois.
Les entreprises qui font cette demande attestent qu’elles remplissent les conditions pour bénéficier de cette mesure selon les modalités exposées précédemment.